Attila et les Huns

 

 

L'exemple le plus caractéristique et le plus dramatique est celui que nous offrent les Huns. Des sinologues ont identifié ces Barbares avec des nomades de race turco-mongole qui occupaient la Mongolie au II siècle avant l'ère chrétienne, les Hiong-Nou. Ils les ont suivis en Asie pendant plusieurs siècles, jusqu'au milieu du V siècle après Jésus-Christ; à cette date, ces Barbares apparaissent sur les bords de la mer Caspienne, d'où ils se jettent sur l'Occident. Déjà Amien Marcellin s'est fait l'écho de la frayeur qu'ils inspiraient; il montre les Huns anéantissant et brisant tout ce qu'ils trouvaient sur leur route. Un siècle plus tard, ils sont installés au centre de l'Europe, sur un vaste territoire qui forme aujourd'hui la Hongrie, la Moldavie et la Russie méridionale. Ils ont même pris alors un vernis de civilisation, et leur chef, fils de Moundzouk, Attila, qui, grâce à l'assassinat de son frère aîné Bléda, était devenu le seul chef de l'Etat des Huns, nous est représente par Priscos, ambassadeur de l'empereur d'Orient, comme un Mongol de petite taille, à la grosse tête et au nez camus. C'était, autant qu'un guerrier, un diplomate procédurier et subtil, fort au courant de la politique impériale. Le chef militaire de la Gaule, le patrice Aétius, le connaissait bien: il n'avait pas hésité à intriguer avec lui, prenant à son service quand il le fallait des bandes de Huns pour châtier certains de ses ennemis, comme les Burgondes. Un prétexte futile brouilla les deux chefs, Aetius et celui qu'on appela plus tard le " Fléau de Dieu". Cette discorde eut pour effet de déchaîner sur la Gaule les troupes d'Attila.

Les chroniqueurs du V siècle et surtout les auteurs de vies de saints ont décrit la panique causée par ces envahisseurs dont le nombre ne devait pas excéder celui de 40 000, encore que l'imagination de certains historiens se soit plu à le grossir démesurément. Terrorisés par leur approche, les Parisiens résolurent de fuir en emportant leurs biens les plus précieux, et ils auraient exécuté leur dessein, Si une jeune fille de bon sens, sainte Geneviève, ne les en avait sagement dissuadés en exhortant leurs épouses à veiller dans les églises pour conjurer le péril.

A Orléans, qui, moins favorisé que Lutèce, se trouvait sur le passage des Huns, l'évêque Aignan réussit par ses prières, au dire d'un de ses biographes, à prévenir le sac de la cité; Aétius et les Goths, qui étaient attendus avec une fébrile impatience par les habitants, arrivèrent à temps pour faire lever le siège aux assaillants.
Le combat décisif se livra près de Moirey (Aube), le long de la voie romaine de Sens à Troyes; ce fut la bataille des champs Catalauniques (Campus Mauriacus). Pour se mesurer avec Attila, le patrice romain Aétius mobilisa une armée aussi bigarrée que celle de son adversaire. Elle comprenait quelques effectifs gallo-romains, mais principalement des contingents barbares, Burgondes, Alains, Saxons, Sarmates, et surtout des Wisigoths. A lire le récit détaillé et ampoulé que Jordanès a laissé de cette bataille, les Wisigoths auraient été les principaux artisans de la victoire, mais l'historien s'est laissé égarer par son patriotisme gothique. D'ailleurs, malgré le caractère sanglant de la mêlée, le succès ne fut pas complet, car Attila échappa à ses ennemis avec une partie de ses guerriers, ce qui lui permit de tenter l'année suivante (452) un nouveau raid sur l'Italie. Seule, une mort assez mystérieuse, survenue la nuit de ses noces avec une belle Germaine nommée Ildico, délivra l'Occident d'un ennemi redoutable.