Clotaire II
L'assassinat spectaculaire fut l'épilogue du massacre de la famille royale,
et le royaume des Francs, comme sous le premier Clotaire, tomba tout entier
au pouvoir de Clotaire II, fils de Chilpéric 1er et de Frédégonde
(613). Le nouveau roi avait un caractère peu énergique, et les
grands laïques et ecclésiastiques profitèrent de sa faiblesse
pour le soumettre à leurs caprices. L'édit de 614 est la preuve
de cet affaiblissement de l'institution monarchique. L'assemblée qui
le dicta au roi était à la fois un synode d'évêques
et une réunion de grands laïques. Ses membres apportèrent
leurs doléances, auxquelles le roi donna satisfaction. Cet édit,
que Clotaire publia sous la pression des grands.
Le style du document est celui des actes conciliaires ; il masque sous une forme grandiloquente les intentions égoïstes de ses auteurs. Mais elles se laissent parfois deviner, par exemple lorsque le roi ordonne la restitution générale et immédiate de tous leurs biens aux leudes qui, pendant l' " interrègne ", avaient gardé leur foi à leur seigneur légitime. Les évêques, de leur côté, ont su obtenir de nombreux avantages: la réglementation des élections épiscopales et des privilèges de juridiction. Cet édit ne s'appliquait qu'à la Neustrie, mais en 617, Clotaire convoqua à Bonneuil une assemblée des évêques et des " farons " de Bourgogne; il y fit droit à leurs pétitions justifiées, et confirma ses concessions par un " précepte ", c'est-à-dire un édit écrit. N'est-ce pas la preuve que toutes les mesures prises par Clotaire II au début de son règne lui ont été dictées par l'aristocratie ?
la fin du VIe siècle, il y a trois royaumes: l'Austrasie, c'est-à-dire la France orientale, l'ancien lot du roi Sigebert ; la Neustrie, c'est-à-dire le nord-ouest de la Gaule; la Bourgogne, l'ancien royaume des Burgondes, qui, bien que conquis par les Francs en 534 était resté une entité vivante. Réunis dans les mains de Clotaire II ces trois royaumes conservèrent cependant leur autonomie. Chacun d'eux garda son maire du palais, et c'est un nouveau signe de l'avilissement du pouvoir royal que la puissance grandissante de cette institution. Humbles officiers de la maison du roi, puisqu'ils étaient les ordonnateurs de la vie matérielle du souverain. Il sont devenus à une époque où le service domestique du prince et les fonctions publiques de l'État étaient encore confondus, de véritables Premiers ministres, des chefs de gouvernement, des grands vizirs.
Leur ascension a été rapide, puisque, dès les premières années du VIle siècle, ils étaient déjà considérés comme des personnages de premier plan. L'avènement d'un maire du palais est noté par pseudo-Frédégaire dans sa chronique avec le même soin qu'est relevé un changement de ministère par celui qui écrit de nos jours l'histoire politique d'une monarchie parlementaire.