Les derniers Mérovingiens
Un fait nous apparaît comme certain : si Dagobert a tenté de relever
le royaume des Francs, ses patients efforts n'ont pas abouti. L'anarchie renaît
sous le règne de ses fils. Le siècle qui s'étend de sa
disparition à la bataille de Poitiers (732) est un des plus obscurs de
notre histoire. C'est l'époque dite " des rois fainéants
". Débauchés, dégénérés, souvent
faibles d'esprit les derniers Mérovingiens ont eu, pour la plupart, des
règnes courts et n'ont fait que passer sur le trône.
Les derniers Mérovingiens ne gouvernaient plus et toute l'administration du royaume était aux mains du haut fonctionnaire qu'il appelle le " préfet du palais ", ( praefectus aulae ). Les maires, qui avaient pour mission de diriger le palais, ont fini, en effet, par mettre les rois en tutelle. Mais on chercherait vainement à prêter à ces maires une politique cohérente. Tantôt ils apparaissent comme les chefs et les représentants de l'aristocratie de leur royaume; tantôt ils prennent la défense du roi contre les grands; le plus souvent, il font une politique purement personnelle
On entrevoit la lutte de deux forces en présence: les Neustriens et les Austrasiens. La chance d'une dynastie qui a su manuvrer habilement a fini, après de nombreuses vicissitudes, par faire pencher la balance du côté de l'Austrasie. L'examen des noms de lieux jette une lueur sur le conflit. On a relevé en effet, d'une part dans la banlieue parisienne, dans la Picardie et la Beauce, de l'autre en Austrasie, autour de Metz, sur les bords de la Meuse et dans les Vosges. De nombreuses localités dont les vocables sont formés d'un nom patronymique franc et de suffixes tels que court, ville ou villers. Ces suffixes signifient tous " grands domaines ".
Sous les noms de communes situées en Eure-et-Loir et Seine-et-Oise, telles Ansoncourt, Badonville, Guyancourt, nous découvrons la présence ancienne de leudes neustriens qui s'appelaient Anso, Baddo et Wido, et qui s'étaient constitué de vastes possessions en Beauce. En revanche, Thionville, Rambervillers, Bettoncourt, villes et villages de Lorraine, évoquent à notre esprit le souvenir de grands austrasiens se nommant Théodon, Rambert et Betto. Eux aussi étaient de riches propriétaires. Sans prétendre délimiter avec rigueur l'aire géographique de ces groupes, on peut affirmer qu'à la faveur de l'anarchie mérovingienne deux aristocraties terriennes se sont formées, l'une en Neustrie, l'autre en Austrasie.
A vouloir s'attacher par des dons de terres ces grands cupides et insatiables,
les rois mérovingiens se sont ruinés, comme trois siècles
plus tard s'appauvriront les Carolingiens et les ducs de France, qui chercheront
à retenir par des distributions de fiefs des vassaux infidèles.
La misère des derniers Mérovingiens est devenue légendaire.